L'Ukraine ambitionne de redevenir un "grenier à céréales" mondial
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L'Ukraine ambitionne de redevenir un "grenier à céréales" mondial
L'Ukraine ambitionne de redevenir un "grenier à céréales" mondial
L'Ukraine est loin d'exploiter tout le potentiel de ses terres agricoles.
Kiev Envoyée spéciale
L'Ukraine pourrait bien retrouver d'ici quelques années un statut de "grenier à grains" au niveau mondial. Consciente de son énorme potentiel agricole, cette ex-République soviétique réputée pour ses fameuses terres noires (chernozems), parmi les plus fertiles au monde, en nourrit l'ambition. Comme pour la Russie et le Kazakhstan avec lesquels elle dessine une nouvelle "écharpe céréalière" - la Corn Belt de l'Est par analogie à la Corn Belt américaine -, l'agriculture est l'un de ses atouts. Voire son premier, car l'Ukraine n'a pas les ressources gazières et minérales qui assurent à ses deux voisins une rente confortable.
Déjà premier fournisseur mondial d'orge et deuxième en tournesol et en colza, l'Ukraine produit autour de 50 millions de tonnes de grains, dont 23 millions pour l'exportation. "Mais d'ici dix à quinze ans, le pays a vocation à tripler sa capacité exportatrice. Et à devenir un des grands fournisseurs, si ce n'est le principal fournisseur, des pays importateurs du grand bassin méditerranéen, note Jean-Jacques Hervé, ex-conseiller du ministre ukrainien de l'agriculture et aujourd'hui chez Index Bank, la filiale locale du Crédit agricole. Ce pays a un potentiel de production de 100 millions de tonnes."
L'Ukraine est loin d'exploiter tout ce potentiel. Un tiers de ses 42 millions d'hectares de surfaces arables est en friche et un autre tiers est mal exploité. Lancée dès 1992, la privatisation des terres s'est faite en attribuant aux ex-kolkhoziens un titre de propriété de 2 à 5 hectares. Aussi pour éviter une dislocation du foncier, un moratoire sur la vente des terres agricoles a été décidé et prorogé depuis. Or nombre d'Ukrainiens préfèrent louer leurs droits fonciers plutôt que d'exploiter leur parcelle.
Certains se sont regroupés pour former de petites exploitations mais ils n'ont pas les moyens de se développer. D'autant qu'avec un secteur bancaire anémié depuis la crise de 2008, le crédit est rare. Sur les 50 000 exploitations existantes, seules 8 500 ont les moyens de se moderniser et d'être compétitives. A savoir celles s'étendant sur plus de 500 hectares et tenues par des entreprises agricoles ukrainiennes ou des entrepreneurs étrangers - scandinaves ou anglo-saxons principalement.
Formidable potentiel
Des groupes étrangers venus investir en 2006-2007, lors de la flambée des prix des céréales, doivent aujourd'hui revoir leur stratégie. Les déboires du fonds anglais Landkom, installé depuis 2007 dans l'ouest du pays et qui a perdu 56 millions de dollars (45 millions d'euros) en 2008, illustrent les limites d'implantations mues par la seule logique spéculative. Mais l'Ukraine garde cependant un formidable potentiel pour les investisseurs.
L'entrepreneur français Charles Beigbeder, qui a misé sur la production agricole en 2007, en fait partie. Son agro-holding Agro Génération exploite six fermes en Ukraine reparties sur plus de 45 000 hectares et produisant 150 000 tonnes de blé, orge, maïs, seigle, colza ou tournesol. Dont un tiers vendu sur le marché local. Et M. Beigbeder escompte bien d'ici fin 2012 exploiter 100 000 hectares.
Chaque hectare acquis - certains étant en friche ont dû être remis en culture - a nécessité un investissement initial de 700 euros. Mais la modernisation des exploitations et de l'application de nouvelles méthodes de production ont entraîné de réels progrès. "Nous avons des rendements de 40 quintaux par hectare, que nous escomptons porter à 53 quintaux d'ici peu, relève Charles Vilgrain, cofondateur d'Agro Génération qui emploie 350 salariés permanents. C'est certes moitié moins que dans la Beauce, mais nous avons des coûts de production nettement moins importants." Agro Génération affiche aujourd'hui une rentabilité, par ferme, de 15 % à 20 % par an... sans subvention.
Non subventionnées, les exploitations agricoles en Ukraine bénéficient néanmoins d'une exonération d'impôt sur les sociétés et d'un régime spécifique de TVA. "Même si ces aides étaient supprimées, nous resterions largement rentables, note cependant Alexandre Joseph, le directeur financier. Car nous sommes sur un modèle à bas coûts, avec de fortes économies d'échelle du fait de la taille des exploitations."
Laetitia Van Eeckhout
L'Ukraine est loin d'exploiter tout le potentiel de ses terres agricoles.
Kiev Envoyée spéciale
L'Ukraine pourrait bien retrouver d'ici quelques années un statut de "grenier à grains" au niveau mondial. Consciente de son énorme potentiel agricole, cette ex-République soviétique réputée pour ses fameuses terres noires (chernozems), parmi les plus fertiles au monde, en nourrit l'ambition. Comme pour la Russie et le Kazakhstan avec lesquels elle dessine une nouvelle "écharpe céréalière" - la Corn Belt de l'Est par analogie à la Corn Belt américaine -, l'agriculture est l'un de ses atouts. Voire son premier, car l'Ukraine n'a pas les ressources gazières et minérales qui assurent à ses deux voisins une rente confortable.
Déjà premier fournisseur mondial d'orge et deuxième en tournesol et en colza, l'Ukraine produit autour de 50 millions de tonnes de grains, dont 23 millions pour l'exportation. "Mais d'ici dix à quinze ans, le pays a vocation à tripler sa capacité exportatrice. Et à devenir un des grands fournisseurs, si ce n'est le principal fournisseur, des pays importateurs du grand bassin méditerranéen, note Jean-Jacques Hervé, ex-conseiller du ministre ukrainien de l'agriculture et aujourd'hui chez Index Bank, la filiale locale du Crédit agricole. Ce pays a un potentiel de production de 100 millions de tonnes."
L'Ukraine est loin d'exploiter tout ce potentiel. Un tiers de ses 42 millions d'hectares de surfaces arables est en friche et un autre tiers est mal exploité. Lancée dès 1992, la privatisation des terres s'est faite en attribuant aux ex-kolkhoziens un titre de propriété de 2 à 5 hectares. Aussi pour éviter une dislocation du foncier, un moratoire sur la vente des terres agricoles a été décidé et prorogé depuis. Or nombre d'Ukrainiens préfèrent louer leurs droits fonciers plutôt que d'exploiter leur parcelle.
Certains se sont regroupés pour former de petites exploitations mais ils n'ont pas les moyens de se développer. D'autant qu'avec un secteur bancaire anémié depuis la crise de 2008, le crédit est rare. Sur les 50 000 exploitations existantes, seules 8 500 ont les moyens de se moderniser et d'être compétitives. A savoir celles s'étendant sur plus de 500 hectares et tenues par des entreprises agricoles ukrainiennes ou des entrepreneurs étrangers - scandinaves ou anglo-saxons principalement.
Formidable potentiel
Des groupes étrangers venus investir en 2006-2007, lors de la flambée des prix des céréales, doivent aujourd'hui revoir leur stratégie. Les déboires du fonds anglais Landkom, installé depuis 2007 dans l'ouest du pays et qui a perdu 56 millions de dollars (45 millions d'euros) en 2008, illustrent les limites d'implantations mues par la seule logique spéculative. Mais l'Ukraine garde cependant un formidable potentiel pour les investisseurs.
L'entrepreneur français Charles Beigbeder, qui a misé sur la production agricole en 2007, en fait partie. Son agro-holding Agro Génération exploite six fermes en Ukraine reparties sur plus de 45 000 hectares et produisant 150 000 tonnes de blé, orge, maïs, seigle, colza ou tournesol. Dont un tiers vendu sur le marché local. Et M. Beigbeder escompte bien d'ici fin 2012 exploiter 100 000 hectares.
Chaque hectare acquis - certains étant en friche ont dû être remis en culture - a nécessité un investissement initial de 700 euros. Mais la modernisation des exploitations et de l'application de nouvelles méthodes de production ont entraîné de réels progrès. "Nous avons des rendements de 40 quintaux par hectare, que nous escomptons porter à 53 quintaux d'ici peu, relève Charles Vilgrain, cofondateur d'Agro Génération qui emploie 350 salariés permanents. C'est certes moitié moins que dans la Beauce, mais nous avons des coûts de production nettement moins importants." Agro Génération affiche aujourd'hui une rentabilité, par ferme, de 15 % à 20 % par an... sans subvention.
Non subventionnées, les exploitations agricoles en Ukraine bénéficient néanmoins d'une exonération d'impôt sur les sociétés et d'un régime spécifique de TVA. "Même si ces aides étaient supprimées, nous resterions largement rentables, note cependant Alexandre Joseph, le directeur financier. Car nous sommes sur un modèle à bas coûts, avec de fortes économies d'échelle du fait de la taille des exploitations."
Laetitia Van Eeckhout
Re: L'Ukraine ambitionne de redevenir un "grenier à céréales" mondial
Beigbeder, hussard à la conquête de l'Ukraine
Le Figaro du 02/07/2010
Par Charles Gautier
Avant d'investir en Amérique du Sud, Charles, frère aîné du romancier, Frédéric, veut doubler à 100.000 hectares en 2012 la taille de son empire dans l'ex-république soviétique.
Avec ses faux airs de Largo Winch, on s'imaginerait Charles Beigbeder visitant ses kolkhozes ukrainiens en hélico, n'y passant que quelques minutes avant de repartir pour une destination secrète. Perdu! C'est en minibus qu'il se rend, avec son équipe, dans la ferme de 8000 hectares de Gloukhov, à 350 km de Kiev, écoutant, questionnant, prenant le temps de prendre en photo les champs de blé avec son portable.
Pourtant, comme le héros de bandes dessinées, Charles Beigbeder conduit ses affaires au pas de charge, hussard à la conquête de l'Ukraine. «Son regard extérieur lui permet d'entreprendre des choses impossibles à nos yeux. Il fonce sans arrière-pensées. Croître de 45.300 hectares en trois ans en Ukraine, avec une petite équipe, pour nous, c'était inimaginable!», explique son homme de terrain, Charles Vilgrain, jeune président du directoire d'AgroGénération qui loue désormais les terres de six kolkhozes en Ukraine. Charles Beigbeder en est, avec son associé Alain Mallart, actionnaire de référence. Ils misent sur la hausse nécessaire de 70% de la production agricole prévue par la FAO, pour nourrir la population mondiale d'ici à 2050.
Rien n'est trop beau pour conquérir le grenier à blé de l'Europe sous-exploité: dans la cour du kolkhoze de Gloukhov un énorme Case-IH Steiger articulé, huit roues, 535 chevaux, illustre la démesure de l'exploitation de 8000 hectares. Avec son réservoir de 1000 litres, il peut tourner inlassablement en «trois-huit» pendant les moissons. «L'effet de taille est l'une des clés du succès, assure Alexandre Joseph, directeur financier d'AgroGénération. Le parc motorisé est en moyenne quatre fois plus important qu'en France, mais la superficie 100 fois supérieure.»
Ces fermes n'ont pas été choisies au hasard. L'hygrométrie optimale coïncide avec les très fertiles terres noires, le tchernoziom, dont la couche d'humus est si épaisse qu'elle dispense des coûteuses installations d'irrigation. À Gloukhov, pas de profonds sillons: des disques griffent la terre. Cette méthode plus douce pour l'écosystème est également bonne pour les comptes : «Les économies de carburants et de produits phytosanitaires réalisées permettent une amélioration de 30 à 50% de la marge», assure Alexandre Joseph. «L'optimum est à 53 quintaux équivalent blé à l'hectare», précise Charles Beigbeder. Aujourd'hui, les exploitations sont proches de 43 quintaux, soit près de l'équilibre financier.
Pas d'impôts sur les sociétés agricoles
Depuis le début de l'aventure, l'ensemble des activités a nécessité un investissement total de 30 millions d'euros (Silo, matériels…). Les analystes espèrent un bénéfice pour le quatrième exercice, en 2011. Pour l'exercice en cours le groupe ne devrait pas être si loin de l'équilibre. Particularité locale: en Ukraine pas d'impôts sur les sociétés agricoles, ni de TVA. Pour s'implanter, AgroGénération s'est appuyé sur l'expérience du groupe agri-industriel français Champagne Céréales auquel il vend désormais sa production d'orge.
Les risques sont réels: quatre gardes protègent matériel et récoltes. Les GPS servent non seulement à optimiser l'utilisation des engrais, mais aussi à suivre le matériel à la trace. Pour fidéliser ses 350 salariés, AgroGénération offre les plus hauts salaires de la région (250 à 500 euros), alors que le salaire agricole moyen est de 180 euros.
L'entreprise soigne ses relations avec les 2800 bailleurs des parcelles exploitées. Presque tous sont payés en nature avec des céréales (750 kg) qui leur permettront de nourrir ensuite les animaux. Mais déjà Charles Beigbeder rêve d'autres horizons. «L'implantation en Amérique du Sud avec le décalage de saison permettra de lisser la trésorerie et de mutualiser les risques», explique le créateur d'entreprise qui s'est fixé pour objectif : 100.000 hectares en 2012 en Ukraine.
Le Figaro du 02/07/2010
Par Charles Gautier
Avant d'investir en Amérique du Sud, Charles, frère aîné du romancier, Frédéric, veut doubler à 100.000 hectares en 2012 la taille de son empire dans l'ex-république soviétique.
Avec ses faux airs de Largo Winch, on s'imaginerait Charles Beigbeder visitant ses kolkhozes ukrainiens en hélico, n'y passant que quelques minutes avant de repartir pour une destination secrète. Perdu! C'est en minibus qu'il se rend, avec son équipe, dans la ferme de 8000 hectares de Gloukhov, à 350 km de Kiev, écoutant, questionnant, prenant le temps de prendre en photo les champs de blé avec son portable.
Pourtant, comme le héros de bandes dessinées, Charles Beigbeder conduit ses affaires au pas de charge, hussard à la conquête de l'Ukraine. «Son regard extérieur lui permet d'entreprendre des choses impossibles à nos yeux. Il fonce sans arrière-pensées. Croître de 45.300 hectares en trois ans en Ukraine, avec une petite équipe, pour nous, c'était inimaginable!», explique son homme de terrain, Charles Vilgrain, jeune président du directoire d'AgroGénération qui loue désormais les terres de six kolkhozes en Ukraine. Charles Beigbeder en est, avec son associé Alain Mallart, actionnaire de référence. Ils misent sur la hausse nécessaire de 70% de la production agricole prévue par la FAO, pour nourrir la population mondiale d'ici à 2050.
Rien n'est trop beau pour conquérir le grenier à blé de l'Europe sous-exploité: dans la cour du kolkhoze de Gloukhov un énorme Case-IH Steiger articulé, huit roues, 535 chevaux, illustre la démesure de l'exploitation de 8000 hectares. Avec son réservoir de 1000 litres, il peut tourner inlassablement en «trois-huit» pendant les moissons. «L'effet de taille est l'une des clés du succès, assure Alexandre Joseph, directeur financier d'AgroGénération. Le parc motorisé est en moyenne quatre fois plus important qu'en France, mais la superficie 100 fois supérieure.»
Ces fermes n'ont pas été choisies au hasard. L'hygrométrie optimale coïncide avec les très fertiles terres noires, le tchernoziom, dont la couche d'humus est si épaisse qu'elle dispense des coûteuses installations d'irrigation. À Gloukhov, pas de profonds sillons: des disques griffent la terre. Cette méthode plus douce pour l'écosystème est également bonne pour les comptes : «Les économies de carburants et de produits phytosanitaires réalisées permettent une amélioration de 30 à 50% de la marge», assure Alexandre Joseph. «L'optimum est à 53 quintaux équivalent blé à l'hectare», précise Charles Beigbeder. Aujourd'hui, les exploitations sont proches de 43 quintaux, soit près de l'équilibre financier.
Pas d'impôts sur les sociétés agricoles
Depuis le début de l'aventure, l'ensemble des activités a nécessité un investissement total de 30 millions d'euros (Silo, matériels…). Les analystes espèrent un bénéfice pour le quatrième exercice, en 2011. Pour l'exercice en cours le groupe ne devrait pas être si loin de l'équilibre. Particularité locale: en Ukraine pas d'impôts sur les sociétés agricoles, ni de TVA. Pour s'implanter, AgroGénération s'est appuyé sur l'expérience du groupe agri-industriel français Champagne Céréales auquel il vend désormais sa production d'orge.
Les risques sont réels: quatre gardes protègent matériel et récoltes. Les GPS servent non seulement à optimiser l'utilisation des engrais, mais aussi à suivre le matériel à la trace. Pour fidéliser ses 350 salariés, AgroGénération offre les plus hauts salaires de la région (250 à 500 euros), alors que le salaire agricole moyen est de 180 euros.
L'entreprise soigne ses relations avec les 2800 bailleurs des parcelles exploitées. Presque tous sont payés en nature avec des céréales (750 kg) qui leur permettront de nourrir ensuite les animaux. Mais déjà Charles Beigbeder rêve d'autres horizons. «L'implantation en Amérique du Sud avec le décalage de saison permettra de lisser la trésorerie et de mutualiser les risques», explique le créateur d'entreprise qui s'est fixé pour objectif : 100.000 hectares en 2012 en Ukraine.
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